Vous êtes-vous déjà retrouvé assis dans le métro, à Paris, à Londres, ou à New-York, à observer les voyageurs ? Plus particulièrement à essayer de deviner la montre qu’ils portent au poignet afin de déceler une partie de leur personnalité. C’est ce qui ressort souvent dans les conversations d’amateurs d’horlogerie. Que cela soit dans le métro, dans la rue, au bureau, ou au théâtre, ce petit jeu pour initiés permet de tester sa connaissance horlogère. Audemars Piguet, Richard Mille, Rolex ou la Reverso de Jaeger-LeCoultre ont une longueur d’avance en terme de facilité de reconnaissance. C’est en grande partie dû à leur statut d’icônes horlogères.

Ce statut ne se décrète pas. Il s’acquière au fil du temps, fruit d’un amalgame de bonnes et de belles raisons.

En horlogerie, les différences se retrouvent au niveau du détail. Le support d’expression esthétique étant de petite taille – celle d’une boîte, d’un cadran, ou d’aiguilles – le design revêt une importance primordiale. Design et designers ont une importance cruciale au sein d’une Manufacture horlogère. Certains ont la chance d’avoir « libre expression », lorsque d’autres doivent se fondre dans un style qui appartient à une marque, à un modèle. Ce style est souvent l’identité de la marque. Faisons connaissance avec une marque et un designer au style fort. Une de ces marques reconnaissable au premier coup d’œil dont les produits, même totalement différents les uns des autres lui sont attribuables. Découvrons NOMOS Glashütte !

Nomos Glashütte, une horlogerie allemande

L’histoire de NOMOS se confond avec l’histoire de l’horlogerie allemande. Son berceau, comme celui de la quasi-totalité des montres allemandes, étant à Glashütte, petite bourgade au cœur de la Saxe, en ex-RDA, NOMOS voit le jour après la chute du Mur, en 1990. Du trio de co-propriétaires naîtront en 1992 quatre modèles fondateurs : Tangente, Orion, Ludwig, et Tetra.

Ces quatre modèles font apparaître immédiatement une unicité en terme de forme et de design. Il est question d’épure des lignes et de simplicité des formes. L’influence du mouvement artistique du début du XXème siècle est immédiatement visible. NOMOS s’inscrit dans le Bauhaus. Comment ne pas remarquer le lien qu’il y a entre ces quatre modèles dont de nombreux détails les différent, jusqu’à la forme de la boîte de Tetra qui est carrée ? C’est là tout le génie du design. Pour mieux comprendre comment est pensée une montre NOMOS, nous avons rencontré Thomas Höhnel, l’un des quatre designers actuels de la marque.

Thomas Höhnel, du département Design

Thomas est designer pour NOMOS depuis 8 ans. Son département travaille sur les boîtes, les cadrans, les aiguilles, le bracelet, la boucle, et même la PLV. Toute l’identité de la marque est entre les mains des designers « in-house ».

Dans le processus de création d’une montre NOMOS, ce qui commande est avant tout le calibre. Autrement dit, on commence à construire la montre à partir de son moteur. La fonction prime ! On retrouve ici tout l’esprit Bauhaus qui était à l’origine un courant architectural pour lequel la fonction et la simplicité étaient essentiels.

C’était aussi la philosophie d’Enzo Ferrari qui travaillait en priorité sur les moteurs de ses autos. Le reste, châssis et carrosserie, devant s’adapter. Et on connaît le résultat, avec la création des plus belles automobiles de l’histoire…

Sans avoir la prétention de vouloir créer les plus belles montres de l’histoire, chez NOMOS on est assez fiers des produits proposés. NOMOS Glashütte est une Manufacture. La marque crée ses propres mouvements depuis 2005. Et même quand on interroge Thomas Höhnel, c’est le plus important. C’est pour cela que pour tout nouveau modèle, le mouvement est créé en premier.

À l’origine du design, le calibre

Thomas nous donne l’exemple du mouvement DUW 6101 qui est un calibre offrant la possibilité du quantième poussé à l’extérieur. Ce mouvement a provoqué le design de la Tangente Néomatik 41 Update. Deux brevets ont été déposés sur ce modèle :

L’affichage de la date (entourée de deux repères rouges), et le réglage de la date dans les deux directions du cadran.

Cette montre a été primée au Grand Prix d’Horlogerie de Genève en 2018. Un des innombrables prix reçu par la marque depuis sa création. Mais sans doute le plus important car correspondant aux « Oscars » de l’horlogerie.

Sur Tangente, la typographie date de 1990. A l’origine il y a Roland Schwertner qui, pour créer les quatre premiers modèles, a fait des recherches à Glashütte. Il cherchait des inspirations historiques et a trouvé une montre de poche signée A. Lange & Söhne. Il a restylé la typographie et a ainsi créé les index de Tangente. Devenus bâtons, chiffres romains, points, et complètement divers, ils ont néanmoins conservé quelque chose de commun, un lien dans le style depuis les origines de la marque, il y a 30 ans. Ce lien est conservé dans le design, alors que des calibres horlogers complètement différents sont développés. On eut en déduire que chez NOMOS on ne s’impose aucune limite horlogère à partir du moment où est respectée l’identité visuelle de la marque.

Thomas nous explique que le département Recherche & Développement installé à Glashütte invite régulièrement le département Design installé à Berlin à les rejoindre pour intervenir sur un mouvement. Le but étant de conserver l’identité NOMOS avec un travail sur la masse oscillante, sur les ponts, ou sur la platine.

NOMOS Glashütte s’ouvre à l’extérieur

Il arrive cependant qu’il y ait des collaborations avec des designers ou des artistes extérieurs à la marque. C’est ainsi qu’est née Autobahn Neomatik 41 date Gris Sportif en 2017 de la collaboration avec Werner Aisslinger.

Même si la montre est totalement différente de ce qui a été fait jusqu’alors, on reconnaît au premier coup d’œil qu’il s’agit d’une NOMOS. Thomas et ses confrères poussent les limites du design tout en restant NOMOS Glashütte. Une prouesse !

Il existe aujourd’hui 13 collections de montres NOMOS. A chaque création de mouvment il est évident qu’il équipera ensuite plusieurs montres. C’est le cas du mouvement évoqué précédemment, le DUW 6101 qui équipe Tangente 41 Update et Autobahn, deux modèles bien différents. Dans une logique très pragmatique, Thomas nous avoue que c’est le marché qui impose le rythme de création de nouveaux modèles. Depuis 5 ans seulement Baselworld a une influence sur la politique  de création de modèles. Les impératifs de présentation de nouveautés au moment de ce salon mondial imposent parfois quelques contraintes. Mais c’est très limité. NOMOS Glashütte ayant plutôt pris le parti de proposer à ses clients (les détaillants) de créer leurs propres séries limitées. La marque leur en laisse l’initiative et met à disposition son département design pour réaliser ce qui s’avère être jusqu’à présent de véritables « Best-Sellers ».